Pourquoi regarder LETIZIA BATTAGLIA de Roberto Ando ?

Le pitch: La vie de Letizia Battaglia, célèbre journaliste et photographe italienne, connue en particulier pour ses enquêtes sur les crimes de la mafia sicilienne, dans les années 1970-80.

Quand on voit que la vie de Letizia Battaglia, célèbre photographe italienne à la renommée mondiale pour son travail sur les crimes de la Cosa Nostra dans les années 1970, a droit à quatre épisodes entiers dans la série de Roberto Ando, on se dit qu’on a le temps de voir un développement lent. C’est en réalité tout l’inverse qui est proposé. 

Le premier épisode est peut-être le plus perturbant des quatre. Il retrace l’enfance et les jeunes années de la future photographe à une vitesse folle. Comme si déjà à l’époque elle était pressée dans un pays figé. Une vie italienne classique, corsetée, prise en étau entre un père autoritaire, une police des mœurs (elle ne porte pas ce nom comme en Iran mais elle agit tout comme en menaçant de prison une femme pour adultère), le poids de la religion et l’obligation maternelle. Dans sa peinture d’époque, on pense à la version télévisée de L’amica Geniale, magnifique adaptation de best-sellers d’Elena Ferrante. Le même grain sépia, les mêmes papiers peints, l’odeur de la clope partout, les plats de pâtes servis le soir et une sorte d’ombre menaçante qui ne dit pas encore son nom de mafia. 

Car c’est ensuite que les choses se corsent pour l’Italie et que paradoxalement Letizia Battaglia prend son envol. Après des premiers pas difficiles dans le journalisme, elle devient une photographe de renom en se penchant au milieu des années 1970 sur les crimes de la Cosa Nostra, la mafia sicilienne. La série permet alors, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, de découvrir le style de la photographe. Du noir et blanc pour montrer les scènes de crimes avec un mélange frontalité et une sorte de pudeur déroutante. C’est un corps inanimé dans une voiture, avec le visage d’un policier moustachu, comme perdu, qui émerge par la droite du cadre. 

En contraste avec ces moments affreux, et c’est là tout son génie, Battaglia prenait les “normaux” en photo, les rendant plus vivant que jamais : gamine avec un ballon de foot, une vieille dame rentrant chez elle, des prostituées, des gens de la rue, c’est un quotidien magnifié qu’elle nous offrait. Son regard se doublait d’une bienveillance pour les faibles, en témoigne sa première interview avec une prostituée qui se cache. La série montre tous ces moments, y compris le tournant de sa fin de carrière quand elle se penche plus sur le monde des aristocrates et de la mode.

Car comme le montre les quatre épisodes, Battaglia était aussi une femme moderne, tenant à sa liberté et à celle des gens, passionnée par la culture, fascinée par Pasolini. Ce sont des discussions dans les cafés, des conférences de presse, des voyages à Paris. Mais aussi une liberté sexuelle qui dérange le patriarcat. Au fond, la série raconte ce numéro d’équilibriste pendant toute une vie. Elle n’a jamais vraiment calculé ce qu’elle deviendrait, mais a toujours revendiqué son droit à essayer, échouer, réessayer, réussir, jusqu’à servir de modèle. Une femme badass, una donnageniale pour le dire en italien.

Parce que cette mini-série raconte la vie inspirante de la journaliste Letizia Battaglia (1935-2022), première Italienne à être photographe pour un quotidien. Elle a toujours combattu le patriarcat et la mafia. 

Voir la série (4 épisodes)

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