Pourquoi regarder LA CONSPIRATION DES BELETTES de Juan José Campanella ?

Difficile de passer de la gloire à l’oubli. Dans les années 1960, Mara Ordaz était une star du cinéma argentin. Elle tournait aux côtés de son mari Pedro de Cordova dans des films réalisés par Norberto Imbert sur des scénarios de Martin Saravia. Aujourd’hui, loin des projecteurs, oubliés du public, les quatre retraités partagent une belle demeure au milieu d’un grand parc.

Les relations avec Mara sont tendues : l’égocentrique diva des sixties vit mal l’anonymat dans lequel elle est tombée et ne supporte plus son mari et ses vieux amis. L’arrivée d’un jeune couple d’agents immobiliers très intéressés par la maison rend l’ambiance encore plus explosive et les répliques vont se faire de plus en plus vachardes.

Juan José Campanella, lauréat d’un Oscar pour Dans ses yeux en 2009, a mis en scène cette comédie grinçante. Il prend plaisir à plonger quatre stars du cinéma argentin d’hier au cœur d’un machiavélique jeu du chat et de la souris. Un huis clos comme hors du temps, rappelant les ambiances à la Agatha Christie.

La Conspiration des belettes est le remake d’une production argentine de 1976, Los muchachos de antes no usaban arsénico (Les garçons d’avant n’utilisaient pas l’arsenic). Juan José Campanella, alors adolescent, l’avait adorée à sa sortie. Mais ce film était devenu maudit en quelque sorte car, sorti deux semaines avant l’instauration de la dictature militaire, il n’a pas eu le temps de trouver son public. Le réalisateur avait été séduit par son humour noir digne des comédies britanniques des studios Ealing, telles que Tueurs de dames (1955). Campanella, lui, a choisi d’aller plutôt vers la comédie classique des années 40, avec pour référence majeure Lubitsch, et des dialogues spirituels, très écrits. En faisant de ses héros des vedettes des années 60-70, il a pu ajouter une dimension « sexe, drogues et rock n’roll » à son scénario.

Ce film est également l’occasion pour le metteur en scène de délivrer une déclaration d’amour au septième art. Campanella a voulu rendre hommage à ces films qu’il a tant aimés, qui lui ont fait aimer le cinéma et dont les dialogues étaient si brillants. Il a en tête un « cinéma qui n’avait pas honte d’émouvoir, des scénarios capables de nous jouer des tours, de nous duper et nous étonner ». Cet hommage passe par un jeu permanent avec le spectateur comme lorsque le personnage de Martin dit « Attendez, je crois qu’on a le temps pour un dernier acte… ». Mais dans ces clins d’œil, il ne s’agit pas d’érudition, inutile de connaître les noms de réalisateurs ou des filmographies pour les apprécier il suffit d’avoir vu un minimum de films.

Graciela Borges qui interprète Mara, est une authentique star du cinéma argentin. Elle a commencé sa carrière à l’âge de 14 ans dans les années 1950 et tourné dans de nombreux films et séries télévisées. A ses débuts, son père lui ayant interdit d’utiliser son véritable patronyme, elle avait demandé au célèbre écrivain Jorge Luis Borges si elle pouvait lui emprunter le sien. Du coup, chaque fois qu’elle le croisait, il lui demandait si elle faisait toujours honneur à son nom. Ce à quoi elle répondait : « on fait ce qu’on peut… »


PARCE QUE le réalisateur a attendu 22 ans entre l’écriture de la première version de son scénario et le tournage du film.

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