Présenté hors compétition au Festival de Cannes en 1983, Utu a été l’un des tout premiers films néozélandais projetés sur la Croisette. Cette production était à l’époque la plus coûteuse de l’histoire du cinéma de Nouvelle Zélande et elle a fait date dans son pays comme à l’étranger où son réalisateur Geoff Murphy a été célébré par la critique internationale.

« Utu » signifie vengeance en langue maorie. Ce western océanien plonge dans le passé colonial et raconte comment en 1870 un Maori déserte la milice britannique lorsqu’il découvre le massacre commis par des soldats de sa gracieuse Majesté dans son village. Il prend alors la tête d’une révolte contre les Pahekas (les Néo-Zélandais d’origine européenne).

En 2013, Utu est reparu sur les écrans dans une version « redux » c’est à dire remaniée, plus courte de 10 minutes. Quelques séquences ont été raccourcies car selon le cinéaste certaines « choses, à l’époque, étaient drôles ou pertinentes, mais trente ans plus tard, elles n’ont plus aucun sens ». Mais Geoff Murphy et son monteur ont aussi réintégré des scènes qui avaient été retirées des copies destinées à l’international car jugés trop violentes par les producteurs.

Pour Quentin Tarantino, Utu est ni plus ni moins que le meilleur film néozélandais de tous les temps. Cette déclaration a certainement touché le réalisateur Geoff Murphy, qui avait travaillé pendant dix ans sur son projet avant de pouvoir le tourner. Revenir sur le passé colonial comme entendait le faire le cinéaste ne faisait pas l’unanimité. A l’époque il avait expliqué : « Quand vous faites un film sur des conflits raciaux vous prenez des risques. Et quand vous faites un film qui parle de conflit racial dans un pays qui se targue d’avoir mis en place avec succès une société biculturelle, vous prenez encore plus de risques. »

Un acteur non professionnel

Anzac Wallace, l’interprète de Te Wheke, n’était pas comédien avant de jouer dans Utu. Il avait été repéré par une documentariste qui faisait un film sur un conflit social où Wallace était engagé en tant que syndicaliste. Quand on lui a proposé ce rôle de chef maori, il a même cru à une blague ! Modeste, Anzac Wallace considère que nous sommes tous des acteurs. Il ajoute : « J’ai simplement fait ce qu’on me demandait de mon mieux et ça s’est bien passé. » L’acteur en tout cas a su rester patient : il fallait quatre heures de maquillage par jour pour réaliser le moko, ce tatouage qui lui couvrait le visage. Par la suite, il n’a pas moins continué à tourner, notamment dans Rapa Nui. Mais Utu tient une place particulière dans sa filmographie car il lui a permis de se pencher sur l’histoire maorie et de lire sur ce sujet qu’il connaissait peu.

Le producteur Don Blakeney confirme lui aussi que « Utu a contribué à révéler aux Maoris leur propre culture, leur a donné une certaine fierté, et a fait connaître leur culture aux autres. » Utu a véritablement fait date et il a apporté à Geoff Murphy la reconnaissance au-delà des frontières de la Nouvelle-Zélande. A la fin des années 80 le cinéaste a poursuivi sa carrière à Hollywood avec entre autres Freejack, un film de science-fiction avec Mick Jagger et Piège à grande vitesse avec Steven Seagal. Mais Utu reste son préféré. « Je crois que c’est mon meilleur film, a-t-il déclaré. En travaillant à nouveau sur le montage, j’ai été surpris par sa force. »

Voir le film ici.

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