Pourquoi regarder UN AMOUR DE JEUNESSE, de Mia Hansen-Love

Le pitch: Camille a 15 ans, Sullivan 19. Ils s’aiment d’un amour passionnel, mais à la fin de l’été, Sullivan s’en va. Quelques mois plus tard, il cesse d’écrire à Camille. Au printemps, elle fait une tentative de suicide. Quatre ans plus tard, Camille se consacre à ses études d’architecture. Elle fait la connaissance d’un architecte reconnu, Lorenz, dont elle tombe amoureuse.

En l’espace de quinze ans, de 2007 à 2022, Mia Hansen-Løve s’est imposée comme un regard singulier du cinéma français. De ceux qui refusent le lyrisme ou le pathos pour leur préférer la vérité, moins flamboyante peut-être mais d’une justesse plus touchante. Sublimer le banal, voilà la mission que semble s’être donnée la réalisatrice, et Un amour de jeunesse, son troisième film, y parvient furieusement bien en réutilisant le motif du premier émoi perdu puis retrouvé à l’âge adulte. En l’occurrence, il s’agit de celui de Camille, 15 ans et une certaine tendance à l’absolu, pour Sullivan.

Dès le départ, la relation est asymétrique et Mia Hansen-Løve en dévoile toute la cruauté sans en faire trop. Pas de cris, pas de coups, quelques larmes étouffées et des parents désemparés face à la souffrance adolescente. Le mal-être de Camille naît plus dans les ellipses que dans ce qui est montré, et si l’issue est indéniablement tragique, Un amour de jeunesse ne se complaît jamais dans la douleur ni le voyeurisme. Dans le rôle de la jeune femme, Lola Créton est magnifique, habitée par le spleen des gens qui ont trop d’attention pour les détails et de mémoire pour se remettre des déceptions.

L’après est raconté avec autant de nuances. Chez Mia Hansen-Løve, on ne se remet pas d’un chagrin d’amour en replongeant dans un tourbillon mais en mettant un pied devant l’autre pendant suffisamment longtemps. On ne retombe pas amoureux frappé par la foudre, mais parce qu’on a des choses à se dire et à partager. Et surtout, l’avenir ne vient jamais compenser les blessures passées. Soigneusement, la cinéaste évite tous les clichés et toutes les facilités scénaristiques, refusant de faire du retour de Sullivan un événement grandiose.

Mia Hansen-Løve reste également fidèle à ses motifs cinématographiques préférés : les maisons de campagne entourées d’herbes hautes, les personnages qui avancent coûte que coûte dans une vie peu trépidante mais dont il faut se contenter, les relations insatisfaisantes. Un amour de jeunesse est une histoire de temps qui passe et qu’on apprivoise, par hasard et par nécessité, parce qu’il faut capitaliser sur la perte pour ne pas se laisser tomber de chagrin.


Parce que Mia Hansen-Løve raconte avec une grande sensibilité la perte du premier amour et la reconstruction d’une jeune femme.

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