Pourquoi regarder THE FLORIDA PROJECT de Sean Baker ?

Les américains ont pris l’habitude pour parler de Disneyland d’employer le terme de royaume enchanté. Une appellation qui pourrait s’approprier aux films de Sean Baker (qui a remporté la Palme d’Or à Cannes cette année) mais dans une version parallèle, Baker filmant les USA à la marge, comme une flamboyante cour des miracles.

Après le monde du porno dans Starlet et celui des tapins dans Tangerine, il s’attaque à un autre versant prolo dans The Florida Project, ce quart monde made in USA de familles en galère. Celle de Moonee, une fillette de six ans qui vit justement à l’ombre de Disney World. La gamine espiègle n’a pas besoin d’aller chez Mickey pour libérer son imagination. Avec d’autres mômes de son âge, ils ont fait du motel où ils vivent un gigantesque terrain de jeu.

The Florida Project ne sortira quasiment jamais du champ de vision de Moonee, limité aux chambres, couloirs et escaliers du motel sous la protection de Bobby, le responsable du lieu qui devient baby-sitter malgré lui. Une sorte d’écosystème avec ses propres règles, celle d’une solidarité qui soude ses habitants tant qu’elle est encore possible. Baker sait qu’il n’en sera pas toujours ainsi et offre à Moonee et ses amis les derniers instants d’innocence d’un rêve américain de plus en plus déglingué.

Si The Florida Project est porté par une étonnante impression de réalisme, c’est en grande partie dû à la méthode de travail de Sean Baker. Une fois qu’il a la trame centrale de ses films, il se met en quête de décors naturels, puis recrute ses acteurs principaux, souvent des non-professionnels dans le voisinage. Des répétitions filmées, parfois autour d’improvisations à partir d’éléments du récit, servent ensuite pour peaufiner le scénario final.

Baker est un cinéaste qui s’adapte : ainsi le motel de The Florida Project est authentique, tout comme le personnel ou une partie des clients qu’on y voit le sont, vaquant à leurs occupations usuelles pendant que l’équipe tournait. De même, puisque le réalisateur s’était rendu compte lors des repérages que des hélicoptères survolaient souvent le site, il l’a intégré dans son scénario, sachant que sa production n’aurait pas les moyens de les effacer numériquement ou de supprimer leurs sons au montage.

Cette technique se rapprochant d’un cinéma guerilla laisse entrer la vie dans les films de Baker. Ainsi, la piste de départ de The Florida Project était celle d’une relation mère-fille qui se terminait par une fugue à Disneyland. Le reste s’est aggloméré au fur et à mesure. Y compris pour Willem Dafoe, dont le personnage était initialement affublé d’un frère qui est au final devenu un fils, dont l’acteur, Caleb Landry Jones, ne sera casté qu’à une semaine du tournage. Baker qui l’avait commencé en 35 mm se laissera gagner par ses habitudes, filmera les séquences dans Disneyland en toute discrétion avec un iPhone, comme pour transformer les prises de vues en prises de vie.


PARCE QUE c’est une odyssée bouleversante et poétique avec des acteurs amateurs stupéfiants, réalisé par Sean Baker, qui a remporté la Palme d’Or à Cannes cette année !

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