Le pitch: Panique à bord du Shinkansen ! une bombe a été placée dans le train le plus rapide du Japon par un businessman ruiné. Il menace de la faire sauter si le gouvernement ne lui verse pas une rançon. La course contre la montre s’accélère quand il annonce que si la vitesse du train descend en dessous de 80 KM/H, il explosera ! Les services secrets tentent le tout pour le tout pour monter…

Parce que Super express 109 n’est pas qu’une trépidante course contre la montre. Le film de Junya Sato est plus encore une cartouche envoyée par le cinéma japonais à celui américain. La relation entre les deux à souvent été celle d’une rivalité : après avoir répondu au succès planétaire de King Kong en créant son propre monstre géant avec Godzilla, l’industrie japonaise voit d’un mauvais œil l’invasion commerciale d’un nouveau type de films hollywoodiens : les films catastrophe. En ce début d’années 70, ce genre séduit le public populaire japonais avec des films comme Tremblement de terre ou La tour infernale. De quoi faire rager la Toei qui cherche une contre-attaque. Puisqu’un des grands succès du moment, Airport voit Burt Lancaster tenter d’empêcher une bombe d’exploser à bord d’un Boeing en vol, la riposte nippone se passera à bord d’un train roulant à toute allure entre Hiroshima et Tokyo, le super express 109.
Parce qu’en fonds d’un scénario reposant sur un suspense effréné, Super express 109 invite dans ses wagons un fonds critique bien plus dense qu’un sandwich SNCF. Le réalisateur Junya Sato et le scénariste Ryunosuke Ono prennent pour méchant de service, questionnent le boom économique d’un Japon en pleine reconstruction depuis la seconde guerre mondiale. Si le capitalisme mondialisé fait les affaire des grandes sociétés, les petites et moyennes entreprises ferment à la pelle. Okita, y a perdu son boulot et sa femme. En rançonnant l’état via une bombe posée dans une rame de Shinkansen, il ne demande que justice. Avec lui, Super express 109, remodèle le concept basique de Méchant pour lui donner une dimension sociale.

Parce que mettre en scène un emblème, voire une fierté nationale, comme le Shinkansen n’est pas affaire facile. A peine Super express 109 mis en chantier, que des négociations avec la JNR (Japan National Railway, la société d’état gérant tout ce qui tient au ferroviaire au Japon) durent être engagées. A commencer par l’image de la compagnie, forcément un peu écornée, quand le scénario la montre soumise à une rigidité bureaucratique. Le bras de fer se fera redoutable quand la JNR tique sur le titre initialement prévu ( en japonais, Super express 109 s intitule l’explosion du shinkansen) qu’ils veulent transformer en Dernier appel pour le Shinkansen… Ou encore quand elle refusera que l’équipe filme des scènes à bord du poste de pilotage d’une véritable rame. La production utilisera un subterfuge digne d’un film d’espionnage, en faisant passer un acteur étranger pour un conducteur allemand venu étudier la technique japonaise. Il prendra en douce des images qui seront incrustées au film.
Parce que Super express 109 est resté un modèle exemplaire de film catastrophe au-delà du Japon : le succès phénoménal à domicile attira la curiosité des distributeurs du monde entier qui ont amené une sortie internationale à bien plus grande échelle que la plupart des films japonais jusque là. Super express 109 y a gagné un statut de référence restée dans les mémoires. Lorsque trente- neuf ans plus tard apparaît Speed, film reprenant le même principe, mais cette fois-ci à bord d’un bus, il a des airs de remake non-officiel… Graham Yost, le scénariste du film de Jan De Bont s’en défendra en disant… s’être inspiré de Runaway Train, autre film à bord d’un train fou. L’honneur du japon reste pour autant sauf, quand ce film-ci est basé sur un scénario longtemps resté inédit, signé, Akira Kurosawa.
Parce que le film Speed de Jan de Bont est basé sur la même idée, mais avec un bus à la place du train.


