Pourquoi regarder MON ROI de Maïwenn ?

Les films traitant de la passion amoureuse sont nombreux. Mais rares sont ceux qui parviennent à nous transmettre la fièvre dont sont atteints les personnages. Mon roi en fait partie. Pourtant le film de Maïwenn n’est pas consensuel, certains l’ayant même taxé d’hystérique. C’est une question de point de vue, que l’on n’est évidemment pas obligé de partager. La peinture qui est faite des personnages est même assez subtile, la vie n’étant jamais d’une pièce et Maïwenn ayant veillé à ce que la vie soit au cœur de son film.

Quand le film commence, Tony, la jeune femme que campe Emmanuelle Bercot est à l’hôpital, en période de rééducation. L’occasion pour elle de faire le point et de se souvenir. L’occasion pour le film de nous offrir une farandole de flash-backs qui permet de nous tenir à distance des personnages, qui eux sont pris dans le tourbillon des ruptures et des retrouvailles.

En même temps l’hôpital permet de monter en parallèle les blessures de la chair et celles de l’âme quand la vie ne se résout pas à tourner dans le bon sens. Dès lors la guérison est double. Maïwenn reconnaît avoir toujours eu une certaine attirance pour les gens blessés, pour les infirmes, qui doivent faire assaut d’une énergie peu commune pour faire obéir leur corps. Mais ceux qui ne parviennent pas à sortir d’une relation passionnelle destructrice, elles le sont toutes, n’ont rien à leur envier.

Mon roi a été présenté en compétition à Cannes en 2015. Emmanuelle Bercot a obtenu pour son interprétation de Tony le Prix d’interprétation féminine, ex-aequo avec Rooney Mara pour sa prestation dans Carol, de Todd Haynes. Année faste pour la jeune femme, qui venait de présenter en parallèle et en ouverture du Festival La Tête haute, son film à elle… A noter que Bercot était déjà présente au casting de Polisse, le film précédent de Maïwenn, dont elle était également la coscénariste. Il semble d’ailleurs que Cannes porte bonheur aux deux femmes, puisque Polisse avait décroché en son temps le Prix du jury.

Maïwenn n’est pas une cinéaste comme les autres. Le caractère sans doute assez autobiographique de ses films, la douleur qu’ils exhalent, l’intensité dont ils font montre impliquent d’emblée qu’il s’agit d’un cinéma qui brûle. A nous d’y prendre plaisir ou non. Mais même ses détracteurs lui reconnaissent une quête sans relâche de ses moments de vérité chers à Claude Lelouch et qu’elle a peut-être aperçus pendant le tournage des Parisiens, dont elle était l’une des comédiennes principales. Autre mimétisme lelouchien, sa capacité à modeler son film sur le plateau, sans se soucier de ce que demande le scénario. C’est ainsi que l’histoire d’amour de Polisse a peu à peu rétréci au profit des scènes où l’on voit les policiers de la Brigade de protection des mineurs à l’œuvre.

Les films de Maïwenn ont sans doute en commun de mettre en lumière ses blessures. Blessures d’enfance, dépit amoureux ou désarroi de la comédienne au moment des choix de carrière ou face à l’indifférence du public. Même si son film le plus impudique et peut-être le plus beau reste son premier, Pardonnez-moi, où elle se met en scène dans sa relation tumultueuse, pour ne pas dire névrotique, avec ses parents. Ecorchée vive, Maïwenn nous prend à partie comme peu de cinéastes ont su le faire. Quel que soit le désordre qui parfois règne dans ses films, c’est une qualité rare… Quel que soit la fébrilité parfois dérangeante de son cinéma, nous ne pouvons qu’être émus par sa fragilité.

Ecrit par Yves ALION


PARCE QU’IL faut voir Emmanuelle Bercot dans le rôle qui lui a valu un prix d’interprétation à Cannes.

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