Alexandre Mathis le pitch: Dans les années 1970, au Chili, Mike et Mary sembler former un couple sans histoires. Ils travaillent en réalité sous couverture : Mike pour la CIA et Mary pour la police politique chilienne. Ensemble, ils effectuent des missions secrètes (surveillance, meurtres, attentat) pour le dictateur Pinochet.
Pendant la terrible dictature de Pinochet au Chili, un couple en apparence bons sous tous rapports sème la terreur pour le compte du gouvernement. Mary Callejas est une écrivaine de talent, très impliquée dans les activités de son groupe littéraire. Son mari Mike Townley s’occupe de la maison, et semble vivre une vie classique. Sauf que dans leur cave, un prêtre est torturé. Dans leur viseur, plusieurs figures de l’opposition à Pinochet et des anciens alliés du président Allende, assassiné le 11 septembre 1973. Ce pitch, qui résume les premiers épisodes de Mary and Mike est surtout une histoire vraie. Callejas et Towley ont réellement assassiné des cibles. Towley était un ancien agent de la CIA, institution qui a activement aidé le régime du dictateur.
Le cinéma a souvent raconté les années Pinochet du Chili. Par la fiction, notamment sous la houlette de Pablo Larrain (Santiago 73, post mortem), ou par le documentaire (la trilogie de Patricio Guzman: Nostalgie de la Lumière, Le bouton de Nacre et La cordillère des songes). C’est donc tout naturellement que le monde de la série s’en empare également. La création d’Esteban Larrain dépeint avec brio l’ambiance paranoïaque des années 70 du pays. Un opposant un peu bruyant disparaît, se fait éliminer, ou subit quelque terribles expériences scientifiques (terrible épisode 2 de Mary and Mike).
C’est que le traumatisme Pinochet hante toujours le pays, tiraillé entre devoir de mémoire et envie d’aller de l’avant. La série fait comme un rappel salutaire de la collaboration très forte des populations à l’autoritarisme militaire. Voir une femme aussi respectable que Mary s’avérer être une terroriste à la solde des services secrets fait quelque chose. Sa vie de couple faussement normale avec Mike rend le Mal d’autant plus banal, habituel, terrifiant.
La série rappelle dans son contraste entre ces couleurs, ces robes, ce soleil si doux, et la brutalité du réel un autre film sur l’époque, Chile 76 de Manuela Martelli sorti en 2023 en France. Mais Mary and Mike, sorti en 2018 précède le film et son apport sur le sujet n’en est que plus important.
Surtout, cette histoire d’un couple d’agents avec une vie de famille comme couverture parfaite rappelle l’une des plus grandes séries américaines des années 2010 : The Americans. Des espions soviétiques, vivant aux Etats-Unis depuis vingt ans mènent une double vie si parfaite que même leurs enfants n’en savent rien. Sauf que là où la série américaine, aussi bien documentée soit-elle, était une pure invention, l’œuvre chilienne rappelle encore une fois les vrais crimes d’un couple d’anti-héros qui font absolument froid dans le dos.
Parce que cette mini-série addictive revisite, au travers de l’histoire d’un couple, les années noires de la dictature chilienne. Et, aussi incroyable que cela puisse paraitre, elle est inspirée de faits réels.
