Pourquoi regarder L’EMPREINTE de Safy Nebbou ?

La scène d’ouverture est remarquable : Catherine Frot traverse en voiture un quartier incendié, enfumé, comme si elle passait dans une autre dimension. Et c’est le cas puisque quelques instants plus tard, elle décide que la petite fille d’une autre est… la sienne. Elle en est sûre, elle n’en démord pas. Avec la vraie maman de l’enfant se noue alors une relation étrange…

L’empreinte de Safy Nebbou, c’est surtout l’empreinte de la mise en scène car chaque scène devient inquiétante, semblant annoncer un rapt éventuel ou pire. Les décors les plus quotidiens deviennent anxiogènes et le réalisateur surveille chaque attitude, chaque regard comme le lait sur le feu. Après un premier film remarqué dans un registre plus tendre – Le cou de la girafe en 2003, et avant de diriger un duo de choc, Gérard Depardieu et Benoît Poelvoorde, dans L’Autre Dumas, encore un jeu identitaire mais en costumes d’époque, il prouvait déjà son talent de directeur d’acteurs.

Si Sandrine Bonnaire est impeccable dans le rôle de la maman sur la défensive, c’est surtout Catherine qui étonne. Elle est stupéfiante, hagarde, parvenant à nous faire entrer dans sa conviction névrotique avec une douceur inquiétante. Un thriller psychologique passionnant.

Ah Catherine Frot ! Elle joue si bien les bécasses… qui n’en sont pas ! Dans le rôle qui la révéla un peu tardivement, l’épatante Yoyo d’Un air de famille de Cédric Klapisch en 1996, elle incarnait une sacrée cruche mais avec laquelle, tout de même, il ne fallait pas trop pousser le bouchon. A la fin du film, elle remettait son désagréable mari à sa place en lui faisant comprendre qu’elle était loin d’être aussi crédule qu’il le pensait !

Toujours se méfier de son côté bonne fille. Car, derrière, on sent un mystère, quelque chose de froid, un égoïsme génial. Comme dans La Dilettante de Pascal Thomas où elle ne fait que ce qui lui chante, et bien sûr dans son rôle récurrent de Prudence Beresford dans Mon petit doigt m’a dit et Le crime est notre affaire, toujours de Pascal Thomas, où elle préfère quitter sa maison pour enquêter plutôt que de passer ne serait qu’une minute avec sa fille et ses petits-enfants !! Dans Les Soeurs fâchées d’Alexandra Leclère en 2004, elle a beau n’être qu’une petite provinciale, elle finit par tenir la dragée haute à sa soeur snob Isabelle Huppert. Elle est d’une élégance glacée dans La Tourneuse de pages de Denis Dercourt en 2006 et dans un style nettement plus fou et cartoonesque, elle joue comme personne les vieilles dames increvables et rouées face à Albert Dupontel dans Le Vilain en 2009.

Finalement, cette actrice populaire n’est jamais aussi surprenante que lorsqu’elle laisse poindre son côté sombre : voir la remarquable trilogie de Lucas Belvaux Un couple épatantCavale et Après la vie, ou Coup d’éclat de José Alcala en 2011 où elle est magnifique en capitaine de police âpre et obstinée qui sait qu’elle est là pour faire le sale boulot. Quelque chose couve en Catherine Frot et qui s’y « frot » s’y pique…

Ecrit par Guillemette ODICINO


PARCE QUE ce drame familial prend parfois des accents de thriller hitchockien.

Voir le film

Articles recommandés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *