Pourquoi regarder L’AVENIR, de Mia Hansen-Love

Le pitch: Nathalie est professeure de philosophie dans un lycée parisien. Passionnée par son travail, elle aime par-dessus tout transmettre son goût de la pensée. Mariée, deux enfants, elle partage sa vie entre sa famille, ses anciens élèves et sa mère, très possessive. Un jour, son mari lui annonce qu’il part vivre avec une autre femme. Confrontée à une liberté nouvelle, elle va réinventer…

Que reste-t-il lorsqu’il ne reste plus rien ? Voilà la question posée par la réalisatrice Mia Hansen-Løve dans son cinquième long-métrage, L’Avenir, dont le titre apparaît dès le début, avec une ironie cruelle, sur l’image d’une tombe. Nathalie, professeure agrégée de philosophie dans un lycée parisien (Isabelle Huppert), voit toute son existence et ses certitudes s’écrouler les unes après les autres lorsque son mari la quitte pour une autre, qu’elle perd un contrat avec une société d’éditions de manuels scolaires, et que sa mère décède. Ce qui pourrait être une longue descente aux enfers s’apparente plutôt, avec la délicatesse qui caractérise les films de la cinéaste française d’origine danoise, à une réinvention de soi aussi mélancolique que lumineuse.

Tout, chez Mia Hansen-Løve, est souvent très intello, les personnages comme les dialogues – on sent chez la réalisatrice d’ailleurs l’amour porté à la philosophie, enseignée par ses propres parents. Pourtant, son cinéma est aussi organique et sensuel, et c’est en celà qu’il s’élève. Que Nathalie porte un gros chat ou un bébé, qu’elle caresse un âne ou les pages d’un livre, tout est bien vivant et bien en chair. La relation que la professeure entretient avec Fabien (Roman Kolinka), l’un de ses anciens élèves, normaliens aux idées radicales retiré à la campagne avec d’autres camarades pour se tenir en accord avec ses convictions, apporte aussi la chaleur qui pourrait sembler manquer parfois à son quotidien réglé comme du papier à musique. Et ce, sans pour autant tomber dans des clichés romantiques inutiles.

La capacité de Mia Hansen-Løve à traiter ses personnages sans cadeaux mais pas sans tendresse est d’ailleurs impressionnante. La cinéaste (qui écrit elle-même tous ses scénarios) encapsule la réalité triviale d’un vieux couple en une seule phrase (« Mais pourquoi tu m’en parles ? » demande simplement Nathalie à son mari lorsqu’il lui avoue qu’il la trompe), le caractère déceptif d’une relation en quelques regards échangés à table, la solitude dévorante en une crise de sanglots jamais mélodramatique. Rien n’est surligné, tout est léger dans ce cinéma, sans jamais perdre en puissance au contraire. Le jury de la Berlinale ne s’y est pas trompé, en gratifiant le film de son Ours d’argent pour la meilleure réalisation en 2016.

Mais L’Avenir doit aussi beaucoup à son actrice principale. Isabelle Huppert parvient, alors même que son rôle de quinquagénaire bourgeoise n’est pas forcément le plus original de sa filmographie, à se montrer sous un autre jour, fragile et résilient à la fois. Que reste-t-il lorsqu’il ne reste plus rien ? Tout à inventer, semblent répondre l’actrice, son personnage et Mia Hansen-Løve avec son film. 


Parce que ce film très délicat, avec une magistrale Isabelle Huppert, a obtenu l’Ours d’argent de la meilleure réalisation à la Berlinale en 2016.

Voir le film

Articles recommandés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *