Pourquoi regarder INCENDIES, de Denis Villeneuve

Le pitch: À la lecture du testament de leur mère, Jeanne et Simon Marwan se voient remettre deux enveloppes : l’une destinée à un père qu’ils croyaient mort et l’autre à un frère dont ils ignoraient l’existence. Jeanne voit dans cet énigmatique legs la clé du silence de sa mère, enfermée dans un mutisme inexpliqué les dernières semaines précédant sa mort. Elle décide immédiatement de partir au Moyen-Orient exhumer le passé de cette famille dont elle ne sait presque rien…

Parce que Denis Villeneuve a su convaincre l’auteur Wajdi Mouawad de le laisser adapter sa pièce en lui garantissant toute la lattitude nécessaire pour la mettre en scène sur le grand écran : « Wajdi a accepté de me “prêter”Incendies après avoir lu une cinquantaine de pages d’esquisse que je lui ai proposées. Il m’a fait le plus beau des cadeaux : celui de la liberté. Il m’a tout simplement donné carte blanche. C’est la seule manière de réussir une adaptation je crois. »

Parce que le film Incendies opère le même choix que la pièce qu’il adapte, celui de la fiction. Wajdi Mouawad avait nourri son œuvre de son vécu, ayant dû fuir à l’âge de 8 ans son Liban natal pour le Canada. Or celui-ci n’y situa pas l’action au Liban, mais dans un pays fictif du Moyen-Orient. Le cinéaste respectera cette vision : « J’ai finalement décidé de faire comme la pièce et d’inscrire le film dans un espace imaginaire comme Z de Costa-Gravas afin de dégager le film d’un parti-pris politique. Le film traîte de politique mais demeure aussi apolitique. L’objectif de la pièce est de creuser le thème de la colère et non pas de la générer. Le territoire d’Incendies étant un champ de mines historiques. »

Parce que la chronique que dépeint Incendies est incarnée avec force par un casting talentueux mêlant acteurs professionnels canadiens et non professionnels trouvés en Jordanie parmi des réfugiés irakiens. Mélissa Desormeaux-Poulin n’avait tourné que dans trois films avant de décrocher son rôle poignant dans celui de Villeneuve, tandis que Maxim Gaudette avait déjà joué devant sa caméra dans Polytechnique en 2009. Sous l’impulsion de sa directrice de casting parisienne, le cinéaste auditionne Lubna Azabal. L’actrice belge aux origines espagnole et marocaine le convainc aussitôt. Il lui offre ainsi le rôle principal, avec lequel elle décroche de nombreuses récompenses à travers le monde pour son interprétation de Nawal, cette femme dont le lourd passé ressurgira à sa mort pour hanter le présent de ses jumeaux.

Parce que ce quatrième long-métrage de Denis Villeneuve lui ouvrira enfin les portes d’Hollywood. Ses deux premiers films, Un 32 août sur Terre (1998) et Maelström (2000), furent présentés dans de nombreux festivals internationaux et représentèrent le Canada aux Oscars. Mais c’est bien Incendies qui permet au cinéaste de traverser la frontière en 2010 et d’entamer une carrière prolifique aux États-Unis avec l’étouffant Prisoners (2013). Il enchaînera encore 7 longs-métrages, dont la trilogie à grand spectacle Dune, qui le fait revenir filmer en Jordanie, là où il avait tourné Incendies.


Parce qu‘avec cette quête de l’intime nouée en son coeur, ce film percutant de Denis Villeneuve s’inscrit, malheureusement, dans une actualité qui ensanglante encore aujourd’hui le Moyen-Orient, là où des destins se fixent dans l’horreur et des vies innocentes s’en trouvent brisées à jamais.

voir le film

Articles recommandés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *