Pourquoi regarder HUIT ET DEMI de Federico Fellini ?

Dès le titre, il est possible de comprendre que Huit et demi est un film très personnel voire autobiographique pour Federico Fellini. En effet, avant de réaliser celui-ci, le cinéaste avait fait 7 longs métrages et deux sketches considérés comme des quarts des films. Huit et demi est donc un titre logique, ancrée dans une réalité très pragmatique loin de l’aspect inventif des autres titres, semblant dire : « Il est temps de faire un point ».

Et c’est ce que Fellini va faire en racontant l’histoire de Guido. Un point sur son statut de créateur. Comme lui, Guido est réalisateur. Un artiste en panne d’inspiration et contraint à une certaine oisiveté dans un spa après un malaise. Ainsi se laisse-t-il aller à des pensées introspectives allant de ses désirs de harem à son enfance encadrée par la rigueur judéo-chrétienne en passant par une rencontre avec ses parents décédés.

Avec ce long-métrage récompensé aux Oscars, véritable tourbillon naviguant allégrement entre le réel et le fantasmé, Federico Fellini filme un film en train de se faire et de se défaire et nous entraine dans les méandres de la création, les affres de l’inspiration et l’angoisse de la quête du bonheur. Le tout agrémenté de femmes pulpeuses et gracieuses, de cirque et références à l’Italie éternelle.

Avec ce huitième film, Federico Fellini quitte définitivement le néoréalisme italien auquel il était plus ou moins rattaché pour se lancer pleinement dans ce que l’on appellera le baroque fellinien. En effet, le réalisateur s’éloigne totalement du portrait très réaliste du quotidien, de son quotidien en l’occurrence, pour pousser la caricature de ses personnages, mettre en avant des idées, des stéréotypes et puiser dans l’imaginaire, au détriment du réel. C’est ainsi qu’il va se représenter en Guido, ce cinéaste victime du syndrome de page blanche comme on dirait chez les écrivains. Incapable d’aller de l’avant, il a besoin de se replonger dans ses souvenirs mais aussi dans les figures qui ont marqué sa vie, et par conséquent, son œuvre.

Il s’agit bien ici d’une introspection. Avec Guido, interprété par Marcello Mastroianni, l’alter ego de Fellini, ne serait-ce que par son look, le réalisateur fait une sorte de point sur sa vie allant presque vers des réflexions freudiennes pour trouver un sens à son inspiration. Il passe ainsi en revue, confronte, mêle les personnes, personnages, représentations qui ont nourri sa vie et son imaginaire comme les femmes, belles et girondes, fatales ou douces mais aussi sa propre culpabilité venue de l’enfance à cause d’une éducation sévère par l’Eglise Catholique. Au centre d’un cirque en perpétuel mouvement, thème du cirque que l’on retrouve à la fin de Huit et demi sur la ritournelle de Nino Rota, Guido/Mastroianni/Fellini a besoin de faire un point.

Si le thème de la page blanche a souvent été évoqué par les écrivains comme Baudelaire ou Rimbaud, Fellini tend à nous le sublimer en nous entraînant dans ses réflexions qui, à la fois, bloquent et stimulent son imagination. L’artiste a besoin de faire le tour de ses turpitudes, de les mettre en scène intellectuellement afin de pouvoir faire la paix avec elle et avancer, faire un choix. Un véritable film méta où le cinéaste rend hommage à son art, parle des affres de l’artiste mais aussi de son pays, Fellini multipliant les références à l’Italie, une Italie éternelle. En effet, dans Huit et demi, l’eau a une place prépondérante ainsi que le cirque, la « mamma » et la vigne qui sont tous des éléments clés de la Rome antique, offrant ainsi au film une perspective plus large et plus intemporelle.


PARCE QUE le titre renvoie à la carrière passée de Federico, sept films et deux courts qui comptent donc pour un demi !

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